
- Comme pour les hommes, un quartier de prise en charge de la radicalisation (QPR) vient d’ouvrir au centre pénitentiaire pour femmes de Rennes.
- Accueillant actuellement trois détenues radicalisées, il pourra à terme en accueillir 29.
- L’objectif de ce QPR est de « désengager » ces détenues de la violence islamiste et de les « réinsérer ».
L’établissement est unique en son genre. Situé en plein cœur de ville, juste derrière la gare, le centre pénitentiaire pour femmes de Rennes est le seul établissement en France à accueillir uniquement des détenues, principalement des femmes condamnées à de longues peines. Depuis une semaine, la prison, qui compte actuellement 206 détenues, abrite aussi le premier quartier de prise en charge de la radicalisation (QPR) pour femmes, « une première en France et en Europe », selon la directrice Véronique Sousset. Aujourd’hui au nombre de six pour les hommes, ces QPR avaient vu le jour après le choc des attentats de janvier 2015. Confronté au défi de la radicalisation en prison, le Gouvernement avait alors souhaité une prise en charge spécifique des détenus radicalisés avec comme objectif de les « désengager » de la violence islamiste et de les « réinsérer ».
Le centre pénitentiaire pour femmes de Rennes est le seul établissement pénitentiaire exclusivement réservé aux femmes en France. - J. Gicquel / 20 Minutes
A la prison des femmes de Rennes, « la doctrine sera la même », assure Véronique Sousset. « On ne va pas faire de la déradicalisation qui est un fantasme, indique-t-elle. L’objectif est de désengager ces femmes de l’agir violent et de les remettre sur le chemin de la citoyenneté ». Trois femmes, toutes condamnées pour des faits de terrorisme, sont pour l’heure accueillies dans ce nouveau quartier aménagé dans l’ancienne maison d’arrêt. Trois nouvelles détenues les rejoindront d’ici la fin du mois et seize autres suivront enfin d’ici la fin de l’année.
« Sécurité adaptée et accompagnement social »
Une fois les travaux terminés, à l’horizon 2023 ou 2024, il sera en capacité d’accueillir 29 détenues, dont certaines revenantes de Syrie. « C’est un projet d’envergure qui porte des ambitions pour cet établissement », se félicite sa directrice, évoquant « le savoir-faire et la tradition » de la prison qui a déjà eu à gérer des détenues terroristes membres de l’ETA.
Le quartier pourra accueillir à terme 29 détenues radicalisées. - JEAN-FRANCOIS MONIER / AFP
Dans cette aile étanche des autres quartiers pour éviter tout prosélytisme, les femmes radicalisées feront l’objet d’une surveillance particulière de la part du personnel, qui a suivi une formation spécifique de trois semaines. « Mais ce n’est pas un quartier d’isolement amélioré, prévient Véronique Sousset. Le QPR allie sécurité adaptée et accompagnement social ». Dans chacune des cellules de 11 m² composant cette unité, des barreaux ont ainsi été ajoutés aux fenêtres grillagées et le mobilier scellé.
« Insuffler chez elles un doute sur leur croyance »
A l’écart des autres détenues, elles auront accès, en application du droit commun, aux parloirs et aux unités de vie familiale et pourront se promener en groupe réduit dans une cour dédiée. Elles suivront également un programme particulier mêlant activités sportives, ateliers sur la place de la femme ou travail sur l’estime de soi. Des rencontres avec des médiateurs du fait religieux sont également prévues pour « insuffler chez elles un doute sur leur croyance et sur ce qu’on a pu leur faire croire », souligne Ismaël Righi-Belhouari, adjoint au chef de la mission de lutte contre la radicalisation violente.
Tout au long du séjour, d’une durée de six mois renouvelable, une commission sera chargée d’évaluer la personnalité de ces détenues afin de voir si le travail de « désengagement » a porté ses fruits et si un retour en détention ordinaire est envisageable. « On observe dans les QPR pour hommes qu’il faut en moyenne dix-huit mois pour qu’ils soient réaffectés », souligne Véronique Sousset.