À Rouen, la prison BONNE-NOUVELLE prend l’eau

SEINE-MARITIME - L’ÉTAT de la maison d’arrêt a empiré. Fuites et infiltrations rendent le lieu invivable.


• Laurent Derouet

Murs couverts de moisissure sur lesquels l’eau ruisselle, toitures qui fuient, plus d’une quarantaine de cellules condamnées pour insalubrité, un plafond de douches écroulé… L’état de la maison d’arrêt Bonne-Nouvelle à Rouen (Seine-Maritime), qui abrite autour de 600 détenus en plein centre-ville, rive gauche, ne cesse d’alimenter la chronique locale.

La semaine dernière, comme l’a révélé le média d’inves-tigation locale « le Poulpe », une cinquantaine de détenus ont dû être transférés dans d’autres prisons (Beauvais, Caen, Val-de-Reuil…) à la suite d’un audit de sécurité qui pointait « des faiblesses sur les pignons » de plusieurs bâtiments. Un danger qui « ne serait pas imminent », selon l’administration, mais qui a tout de même nécessité cette évacuation et la fermeture de salles d’accueil et de réunion.

Quelques jours plus tôt, l’avocate M e Julia Massardier évoquait ce transfert qu’elle redoutait pour ses clients : « Ce serait une catastrophe qu’on les transfère ailleurs. Ce ne sont que de courtes peines ou des personnes qui attendent leur jugement en détention. Leurs liens familiaux sont ici, leurs chances de réinsertion aussi. »

Avec une consœur, M e Sanson, l’avocate a déposé des recours devant le tribunal administratif pour qu’un expert soit nommé afin de dresser un constat exhaustif de l’état de la prison dont les cellules restantes sont saturées « avec trois détenus qui cohabitent dans 9 m 2 sans pouvoir être debout ».

L’avocate témoigne d’une tension sur place. « Cela fait dix ans que je suis au barreau de Rouen et que je constate la vétusté des lieux. Mais là, un cap a été franchi, il y a urgence à agir. » Ce n’est pourtant pas la première fois que le sort de cet établissement, réputé modèle à son ouverture en 1860, est évoqué. Début 2010, le débat fait rage sur le choix du site qui doit accueillir une nouvelle maison d’arrêt dans l’agglomération rouennaise. Mais, faute de consensus, le projet de construction est remisé sans qu’aucun plan de rénovation d’envergure soit envisagé.

« Plus de temps à perdre »

Sollicité par l’intersyndicale de la prison, Gérard Leseul, député socialiste de Seine-Maritime, a constaté l’étendue des dégâts en décembre dernier. « J’ai eu l’impression d’entrer dans un film en noir et blanc des années 1950 », se remémore l’élu, qui a pris la plume (avec le sénateur Didier Marie et le maire de Rouen, Nicolas Mayer-Rossignol) pour demander au garde des Sceaux, Éric Dupond-Moretti, ce qu’il comptait faire pour remédier à ces problèmes qui « entraînent du stress et de l’insécurité pour l’ensemble du personnel et des détenus ». À son tour, la sénatrice LR Agnès Canayer a posé une question orale début février quant aux solutions envisagées. Jusque-là, aucune réponse précise n’a été donnée.

Attendu dans quelques semaines, un rapport d’experts devrait faire un état des lieux et présenter les différentes hypothèses envisagées pour l’avenir.

Aujourd’hui en France - le 14 février 2024

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