Surpopulation et sous-effectif : les prisons d’Occitanie vont craquer

« Une région à l’agonie ! ». Voilà comment le syndicat Ufap/Unsa Justice régional décrit la situation dans les 19 établissements pénitentiaires implantés de Toulouse à Montpellier, de Perpignan à Nîmes. Alors que le sous-effectif est jugé « chronique », les représentants syndicaux demandent au nouveau gouvernement, et en particulier au ministère de la Justice, de renforcer les effectifs mais aussi d’accélérer les projets de nouvelles prisons et de multiplier les alternatives à l’incarcération.

• Frédérique Michalak

La situation explosive dénoncée par les syndicats pénitentiaires est à la confluence de la surpopulation carcérale, soit 6 400 détenus pour 4 800 places selon le directeur interrégional des Services pénitentiaires de Toulouse, Stéphane Gély (lire aussi l’encadré ci-contre) et du «sous-effectif chronique», souligné par les syndicats.

«Si le ministre supprime des effectifs chez nous, ça va pas le faire, on ne l’acceptera pas»

«À Perpignan par exemple, il manque 35 personnels sur 186 surveillants, indique Johann Reig, secrétaire général régional d’Ufap/Unsa Justice. On ne demande pas plus d’effectif mais qu’au moins ils soient à 186. Et au-delà des coursives, il faut aussi renforcer les effectifs administratifs et également techniquescar la surpopulation entraîne une dégradation plus rapide des structures. Il manque aussi du personnel d’extraction judiciairequi retarde des procès». À Perpignan, les syndicats estiment la surpopulation à 260 % chez les hommes et 230 % chez les femmes.

Ces situations dégradent aussi les relations entre détenus et personnels. «Il y a des incidents réguliers, une agression par mois en moyenne et deux agressions graves par an, énumère-t-il. Cet été, on a eu une prise d’otages à la prison de Perpignan (une tentative le 27juillet-NDLR). Il est impossible de parler de réinsertion dans ces conditions, on n’est que dans l’urgence. Dans les autres régions, la surpopulation est moins importante; ici, à moins de les suspendre au plafond, on ne sait plus où mettre les détenus!».

Alors qu’un nouveau gouvernement vient tout juste d’être installé, le syndicaliste prévient: «Que le nouveau ministre (de la Justice, Didier Migaud-NDLR) ne remette pas en cause les embauches prévues, s’il le fait chez nous, ça va pas le faire, on ne l’acceptera pas. Et qu’il n’annule pas les projets de nouvelles prisons, au contraire qu’il les accélère, déjà qu’on est moins bien doté que d’autres régions!».

Au total, 1 600 places de prison manquent en Occitanie. En attendant que les 1 800 programmées soient construites (lire aussi plus bas), Johann Reig souhaite que le directeur interrégional des Services pénitentiaires «pousse vraiment un cri d’alarme à la direction de l’administration pénitentiaire car on a l’impression d’un «pas de vague», or il faut que cette région soit fortement désencombrée. Ici, on a plus de 850 détenus qui dorment au sol, en Alsace c’est 10». Les syndicats avancent aussi la solution des alternatives à l’incarcération (bracelets, reconduites à la frontière) et d’un «investissement massif» dans de nouvelles prisons et l’accélération des projets en cours, dont trois en Occitanie.

Rivesaltes, Nîmes, Muret: 1 800 places dans les trois futures prisons

Lesquels devraient permettre d’ouvrir 1 815 nouvelles places: 515 près de Perpignan, à Rivesaltes, 700 à Nîmes et 600 au sud de Toulouse, à Muret. Des capacités annoncées pour2027 et2028 (aucune première pierre n’a pour l’heure été posée) qui «combleront les déficits de places un certain temps mais au bout de trois ou quatre ans, on reviendra à la même situation», alerte déjà Johann Reig.

Le premier déplacement de Didier Migaud a été, hier, pour la prison parisienne de la Santé. Voulu comme la manifestation d’une priorité du nouveau gouvernement, sera-t-il rapidement suivi d’effets?

L’Indépendant - le 25 septembre 2024

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