Ce centre de rétention ressemble tant à une prison

Près de Rennes, le seul centre de rétention administrative de l'Ouest héberge 37 étrangers en situation irrégulière, exclusivement des hommes. Dans les coulisses de ce lieu d’enfermement.


Reportage

En théorie, Il ne s'agit pas d'une prison. Mais le centre de rétention administrative (Cra) situé à Saint-Jacques-de-la-Lande, près de Rennes. présente, par bien des aspects, une forte ressemblance avec un établissement pénitentiaire. Grilliages métalliques et portes blindées, murs gris et barbelés, lits cloutés au sol, pièces nues…


"Les conditions ici sont même pires souffle Catherine Glon, bâtonniere de l'ordre des avocats de Rennes, qui l'a visité pour la deuxième fois, fin novembre.


« Les hommes envoyés au Cra sortent de prison, le plus souvent. Ils imaginent être libres et ils arrivent ici, acquiesce une policière, coordinatrice de rétention. 


Alors nous, on essaie de faire ce qu'on peut pour humaniser l'endroit. « La cheffe du centre appuie le propos : « Nous ne sommes pas des coeurs de pierre. Nous parlons avec eux, de leur parcours. Il faut une bonne dose de psychologie pour travailler ici.»


Centre réservé aux hommes


Géré par la Police aux frontières (Paf), le seul Cra de l'Ouest, ouvert en 2007 et réservé aux hommes depuis 2020, a pour fonction, pour une durée limitée, de maintenir tes étrangers en situation irrégulière susceptibles d'être reconduits à la frontière. Ils sont sanctionnés pour une infraction au séjour, l'administration ne leur reconnaissant pas le droit de rester sur le territoire français.


Parfois. ils sont remis en liberté au terme de procédures complexes, mais reviennent ici, deniers les hautes grilles qui ceinturent ce lieu éloigné des regards, entre aéroport et parc des expositions. Sauf en cas d'activités terrorristes, la durée de rétention est limitée à 90 jours.


Ce jour-la Catherine Glon est accompagnée d'Élodie Praud, avocate responsable du groupe de défense des étrangers, au barreau de Rennes et du député socialiste d’Ille-et-Vilaine (8e circonscription), Mickael Boulaie, qui exerce le droit de visite accordé aux parlementaires dans les lieux de privation de liberté. Sortant un ruban métrique de sa poche, la représentante des avocats mesure la largeur et la longueur de la pièce où dorment deux hommes, dans un bâtiment qui compte cinq chambres. 4,20 m sur 2,60 m. soit presque 11 m2. Elle vérifie aussi l'épaisseur des matelas. Douze centimètres, c'est moins qu’à la prison des hommes commente-t-elle.


Un étranger est arrivé au Cra, il y a quelques jours. Un autre est en train d'être expulsé vers la Roumanie, informe Hélène Decq, membre de la Collecte. l'association qui accompagne les personnes étrangères en situation d'expulsion, et tient des permanences au Cra. Actuellement, 37 hommes y sont retenus dans ce centre.


"Un enfermement dans l’enfermement"


Un sujet de préoccupation réunit juristes et membres de la Cimade. Depuis mars, des travaux empêchent toute activité sportive et limitent fortement la circulation. Le chantier, dans la cour. vise à créer deux City stades (des parcs bitumes). qui devraient ouvrir dans quatre mois. D'ici là, les hommes logés dans un des six bâtiments peuvent marcher un peu dans la petite cour, sur laquelle ouvre chacun d'eux. Et faire un peu de musculation, sur un seul agrès.

Ces cours-là ont certes été agrandies, récemment, mais le sentiment demeure d'un enfermement dans l'enfermement, avec des espaces de circulation qui sont limités, alerte Helene Ducq. D'autant que les personnes ne sortent que deux fois, quotidiennement, de cet espace restreint soit une heure et demie quotidienne, au total.


Un lien vers l'extérieur est garanti par les droits de visite, limités à trente minutes. Ils peuvent aussi utiliser un téléphone portable remis à leur arrivée et dans lequel il est possible d'insérer leur carte Sim Ils ont aussi la télévision « avec toutes les chaînes possibles ». détaillent les policiers. El dans les salles dites de « détente des baby-foots devraient être installés bientôt.


Après les travaux, le Cra retrouvera, en mars 2025. sa capacité d’accueil, fixée à 52 étrangers sans papiers.

Angélique CLÉRET.

OUEST-FRANCE, le 10 décembre 2024

PLAN DU SITE - © la FRAMAFAD PACA & CORSE- 2024 - Pour nous joindre