FRAMAFAD PACA & CORSE

Fédération Régionale des Associations de Familles et Amis de Détenus PACA CORSE

RÉINSERTION : le « Thalassa »au service d’anciens détenus

Propriétaire de la péniche mythique, l'association Wake up Café s'emploie à offrir une seconde chance aux anciens prisonniers


Quai liberté, port de Javel, 15° arrondissement de Paris. Entre la statue de la Liberté et la tour Eiffel, Thalassa, qui porte le nom de l'émission autrefois animée par Georges Pernoud, est amarrée, désormais reconvertie.


L’été, c'est guinguette et terrasse, le reste du temps, restaurant avec séminaires d'entreprise, soirées, anniversaires ou mariages... Tout ce qu’il y a de plus banal pour une péniche des bords de Seine. À ceci près que les employés sont très majoritairement d'anciens détenus qui suivent un programme de réinsertion sociale. À l’origine de l'aventure, Clotilde Gilbert. Aumônier de prison à Nanterre pendant 7 ans, elle trouve un jour un travail à un ancien détenu dès sa sortie.


Le bruit circule immédiatement : la demande se crée, le besoin se révèle. Et Clotilde Gilbert décide d’y répondre en fondant l’association Wake up Café, entièrement dédiée à la réinsertion.


Yassine est le plus jeune salarié de la péniche, il a vingt-et-un ans. Sorti de la maison d’arrêt de Vil-

lepinte le 1° septembre dernier, il effectue un stage comme hôte d'accueil sur la péniche : « J'ai

entendu parler de l'association grâce à ma SPIP (le service pénitentiaire d'insertion et de probation) en

détention. » Tout a commencé par écrire une lettre à l’administration pénitentiaire pour développer ses motivations. « Ça dépend aussi de nous, il faut le vouloir ! », insiste-t-il. Lui à su convaincre, et a donc rejoint le programme Re-<Insert>, qui permet aux détenus de quitter la prison plusieurs journées afin de préparer une éventuelle entrée dans l’association. Le programme Re-<Insert> dure trois semaines, le temps d'évaluer la motivation.


Wake up Café ne veut pas transiger sur son exigence : elle n'aide que ceux qui ont envie de s’en sortir et changer de vie. Amir, un autre salarié, résume: « Certains passent Wake up Café

n’aide que ceux qui s’en donnent les moyens leur détention à ne rien faire, d’autres veulent s’en sortir et s’en donnent les moyens. » Qu'ont fait tous ces anciens détenus pour passer par la case prison ? Impossible d’en savoir plus : la peine est purgée, on passe à autre chose. L’association précise simplement ne pas s'occuper des condamnés pour des faits de terrorisme, de délits sexuels sur mineurs ainsi que les personnes atteintes de troubles psychiatriques ou d’addictions trop importantes.


Après l'étape du programme Re-<Insert>, vient le moment de devenir un « wakeur », membre à part entière de l’association. En plus du travail, l’accompagnement se veut complet : logement, papiers, reprise d’études...


Et suivi humain. Les « wakeurs » déjeunent et dinent ensemble et se répartissent la charge de ces repas à préparer. Une fois par mois, les anciens viennent témoigner de la réussite de leur réinsertion. Le programme est unique en France, mais son succès est indéniable : Wake up Café a accueilli 1 500 détenus depuis sa création en 2014. Quai Liberté a vu le jour en 2020 et en a accompagné 140. Et les chiffres du ministère de l'Intérieur sont plus qu'encourageants : 12,8 % seulement ont récidivé. C'est 50 % pour le reste des prisonniers ! Un succès qui se raconte : « Deux anciens font partie de l’équipe aujourd'hui » explique Solène, chargée de communication à Quai Liberté. « L’un est responsable pédagogique et anime les ateliers de culture générale et l’autre donne des cours de sport et vient témoigner en détention.

L'idée est de créer la rencontre des personnes qui ont réussi à s'en sortir pour pouvoir inspirer les autres. »


L'initiative n'est pas passée inaperçue : non seulement les agents de Wake up Café ont leur mot à dire sur les sorties anticipées des prisonniers qu'ils suivent, mais l’État finance 50% de leur prise en charge par l’association. Pour le reste, les donations privées ne manquent pas. Notamment parce que l’association a su nouer des partenariats avec plusieurs entreprises comme Vinci, Nespresso ou France TV qui s'engagent à embaucher d’anciens « wakeurs » ! Résultat, la liste des métiers proposés est diverse : employé commercial dans la grande distribution, préparateur de commandes dans la grande distribution, agent de sécurité, emplois dans la restauration (cuisine et salle), technicien dans la climatisation, recruteur de donateurs pour des

associations...


Déjà présente dans neuf villes de France, Wake up Café ouvre désormais deux sites par an en moyenne.

JACQUES DE BRION

Le JDD - le 14 janvier 202

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