Réinsertion Une agence d’intérim s’installe en prison

SUPPECO

Le centre pénitentiaire de la Santé et le spécialiste de l’intérim Adéquat ont signé un partenariat pour aider les détenus à trouver un emploi ou une formation une fois leur peine effectuée.


• Nicolas Maviel

Les détenus de la prison de la Santé, à Paris (XIV e), sont 1 150 actuellement pour… 707 places. Dans ce lieu historique, qui a vu passer des caïds du banditisme ou des people, le taux d’occupation est de 164 %. Et si les détenus restent en moyenne 7 mois, le but est bien évidemment de préparer l’après, la sortie.

C’est dans ce cadre que, le 20 novembre, la directrice adjointe au chef d’établissement, Isabelle Gomez, Yannick Le Meur, directeur du service d’insertion et de probation à Paris, et Rodolphe Vilain, directeur régional Île-de-France, Normandie et Centre d’Adéquat, un spécialiste de l’intérim, ont signé un partenariat de six mois. Une demi-année pour tenter d’amener des prisonniers vers une réinsertion professionnelle stable et diminuer ainsi le risque de récidive.

« Une fierté de les mettre sur la bonne voie »

« Nos équipes seront là une fois par mois pour aider les détenus. Nous, comme nos clients, avons envie de jouer un rôle dans ce domaine, la réinsertion, souligne avec conviction Rodolphe Vilain d’Adéquat. Nous sommes là pour donner une chance à ces personnes à leur sortie grâce à un contact, une formation, une orientation ou un boulot. Certaines entreprises sont d’ailleurs demandeuses de ce type d’action et de profils. Après, on verra si on propose des missions à temps complet, ce qui peut être compliqué à la sortie d’une détention, ou à temps partiel. Mais c’est ­vraiment une fierté de les mettre sur la bonne voie et de les préparer en amont à ce qui les attend. On tend la main dans une véritable action citoyenne. »

Les détenus (des hommes uniquement, dont 75 % sont des multirécidivistes) qui participeront à ces rendez-vous pour l’emploi seront sélectionnés — la prison abrite des profils très différents allant du radicalisé au terroriste, en passant par les spécialistes des vols, vols avec violence, trafic de stupéfiants… —, mais la volonté d’avancer est réelle.

« Quand ils arrivent, nous sommes là pour les connaître, comprendre leurs parcours, les profiler, et nous sommes aussi présents ensuite pour penser à la sortie, au futur hébergement, aux aides sociales, à l’emploi, souligne Yannick Le Meur, du service d’insertion et de probation. Pour cela, nous avons besoin du monde de l’entreprise. Nous travaillons d’ailleurs déjà avec la Mission locale ou France Travail. Si le détenu est déjà assuré d’avoir un toit et un emploi, on divise par deux le risque de récidive. »

Éviter la récidive

« Ces personnes ont vocation à ne faire que passer entre nos mains. Nous ne sommes pas là pour cultiver la fidélisation, assène Stéphane Scotto, le directeur interrégional des services pénitentiaires. Le ­travail est essentiel pour elles. C’est bien pour l’estime de soi, avoir la reconnais­sance de sa famille, pour pouvoir éventuellement indemniser les victimes. L’emploi est un facteur de protection. Le précédent garde des Sceaux nous avait fixé comme objectif qu’un détenu sur deux travaille à la sortie. Ce partenariat va faciliter cet accès à l’activité et donc favoriser la non-récidive. » En septembre 2024 le taux était de 41,5 % selon le site du gouvernement.

En détention, les chiffres du travail progressaient aussi en mars 2024 où 30 % des personnes détenues avaient une activité (contre 25 % en juin 2023) et 10 % accédaient à la formation professionnelle (contre 7 % en juin 2023).

Les détenus seront donc triés en amont. Certains sortiront purement et simplement quand d’autres pourront par ce biais bénéficier d’un aménagement de peine, d’une période de probation.

« On va commencer par un rendez-vous mensuel, mais pourquoi pas deux fois par mois, chaque semaine et même avoir une agence permanente dans nos murs », s’enthousiasme Yannick Le Meur. Le test apportera des éléments de réponses tant au niveau des détenus ou ex-détenus qu’à celui des recruteurs.

En tout cas, les équipes d’Adéquat sont prêtes. Douze personnes se sont portées volontaires pour participer à ce programme dont la première session est programmée au 18 décembre. Cindy Saadoun, chargée de recrutement, connaît déjà un peu cette mission spéciale. « Je n’ai pas d’appréhension particulière, pour avoir participé à un précédent dispositif à Fleury-Mérogis (Essonne), lance la jeune femme. Je n’en garde que des souvenirs positifs sur les bonnes actions menées. Il y a eu des réussites, parfois des régressions, ça fait partie du processus, mais c’est important d’être là et d’offrir cette possibilité d’un retour à l’emploi. »

AUJOURD’HUI en FRANCE, le 17 décembre 2024

PLAN DU SITE - © la FRAMAFAD PACA & CORSE- 2024 - Pour nous joindre