La famille pénitentiaire est en deuil après l’attaque meurtrière d’un fourgon dans l’Eure. Articles de la Croix, La Provence(3 X), Le HuffPost, France3Regions, l’Echo Républicain, Le Dauphiné Libéré, Ouest-France (2X), Aujourd’hui en France, Libé (2 X))
C’est comme une onde de choc qui, en quelques heures, a touché toute une profession, aux quatre coins de la France.
Attaque d’un fourgon dans l’Eure : la « famille » pénitentiaire sous le choc après l’assaut
— framafad paca corse (@WaechterJp) May 17, 2024
C’est comme une onde de choc qui, en quelques heures, a touché toute une profession, aux quatre coins de la France.https://t.co/jnFLtl4ClC
« On est comme une famille en deuil, on parlera plus tard », confie un responsable syndical de l’ouest de la France. « Le bilan est terrible », murmure un délégué à Perpignan. « Là, je ne peux pas parler », s’étrangle, la voix secouée par les larmes, le responsable d’une centrale syndicale dans le sud de la France.
Le monde de la pénitentiaire a été frappé de plein fouet, mardi 14 mai, par l’attaque, au péage d’Incarville dans l’Eure, d’un fourgon qui transportait un détenu de la prison d’Évreux au tribunal de Rouen. Au moins deux agents ont été tués et deux sont en « urgence absolue », selon le parquet de Paris. « Le cinquième agent, qui faisait partie du convoi, a aussi été blessé. Tous les collègues ont donc été visés par les tirs des assaillants, ce qui démontre leur extrême détermination », constate Wilfried Fonck, secrétaire national Ufap-Unsa pénitentiaire.
Le commando a réussi à prendre la fuite en compagnie du détenu, au profil de délinquant déjà solide. Âgé de 30 ans, il a été condamné la semaine dernière par le tribunal d’Évreux pour un vol avec effraction. Mais il a surtout été mis en examen « pour enlèvement et séquestration ayant entraîné la mort » par la juridiction interrégionale spécialisée (Jirs) de Marseille. Il n’était pas considéré par l’administration pénitentiaire comme un détenu particulièrement surveillé (DPS).
« On ne fait pas le poids avec nos 9 mm »
Le transfert de ce détenu était assuré par le pôle de rattachement des extractions judiciaires (Prej) de Caen. D’envergure régionale, ces pôles sont chargés d’assurer le transport des détenus entre deux prisons ou lors d’une comparution devant un juge d’instruction ou un tribunal. À la différence des autres surveillants, ses personnels sont armés. « Mais juste avec des pistolets 9 mm. On ne fait pas le poids face à des types qui attaquent un fourgon à l’arme lourde », confie Thomas Jacquot, secrétaire national du syndicat Ufap-justice, qui exerce au Prej de Béziers depuis 2017.
Le profil du détenu est bien sûr pris en compte pour déterminer le niveau de l’escorte. « Cela va de 1 à 4. L’escorte 1 correspond à un détenu sans problème tandis que l’escorte 4 est prévue pour les détenus relevant du grand banditisme ou du terrorisme », indique Joan Dherse, secrétaire FO-justice et membre du Prej de Reims. « Il nécessitait une escorte de niveau 3 », précise le parquet de Paris. « Il y avait un fourgon et une voiture suiveuse. Mais vu le profil de cet individu, on peut se demander s’il n’aurait pas fallu que l’escorte bénéficie du soutien de forces de sécurité intérieure », estime Wilfried Fonck.
Si le détenu présente un niveau de dangerosité élevé, les agents pénitentiaires peuvent en effet être accompagnés de policiers ou de gendarmes. « C’est particulièrement utile notamment quand vous devez passer un péage, un endroit à risque, explique Thomas Jacquot. Quand vous transportez un détenu, vous essayez de vous arrêter le moins possible. Une voiture de police peut aller à l’avant et faire ouvrir la barrière de péage. Sinon, vous êtes obligés de ralentir. »
Selon le ministère de la justice, c’est la première fois depuis 1992 qu’un agent de la pénitentiaire est tué dans l’exercice de ses fonctions. « Cela fait quatre ans que je travaille dans un Prej. Jusque-là, je n’ai jamais eu d’appréhension en partant au boulot le matin, confie Joan Dherse. Mais avec ce qui vient de passer, je crois qu’on va être nombreux dans les escortes, désormais, à se demander si on rentrera le soir à la maison. »
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L’intersyndicale appelle à un "blocage" des établissements pénitentiaires
Les organisations syndicales ont réagi, hier, après l’attaque du fourgon qui a causé la mort de deux agents. Leurs représentants seront reçus cet après-midi par le garde des Sceaux.
L’intersyndicale a réagi après l’attaque du fourgon qui a causé la mort de deux agents. Elle appelle à un "blocage" des établissements pénitentiaires @laprovence pic.twitter.com/e8mc8x1eOh
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• Marine STROMBONI
Après la violente attaque d’un fourgon, qui a permis l’évasion d’un détenu en Normandie, hier matin, tuant deux agents, l’ensemble des organisations syndicales de l’administration pénitentiaire appelle à un "blocage", aujourd’hui, des établissements et structures pénitentiaires. "Cette journée doit être une journée ’Prisons mortes’ et pourra être reconductible", indique l’intersyndicale.
"Nous sommes tous très affectés, ils ne leur ont pas laissé une chance…, réagit, très émue, Cathy Forzi, élue FO Justice à la prison des Baumettes, à Marseille. Ça ne va pas changer grand-chose, mais dès 6 h du matin, en hommage aux collègues morts et en soutien aux blessés, les agents refuseront de prendre leur service, dans un premier temps."
D’après nos informations, au sein de la direction interrégionale des services pénitentiaire du Sud-Est, qui compte quatorze établissements, douze ont annoncé suivre l’appel au blocage. Hier soir, les deux autres ne s’étaient pas prononcées. "À l’appel de l’intersyndi-cale, il y aura aussi une minute de silence à 11 h, heure à laquelle nos collègues sont morts, poursuit Cyril Huet-Lambing, secrétaire régional SPS (syndicat pénitentiaire des surveillants), élu à la prison de Luynes. Aujourd’hui, nous sommes endeuillés, abasourdis, nous n’avons pas de mots.
On n’est pas dans la phase où on tape du poing sur la table mais l’administration pénitentiaire doit être prête à écouter ce qu’on a à dire, et assumer."
Une minute de silence sera observée à 11 heures, heure de décès des agents.
1 101 agents Prej
Dès cet après-midi, à 14 h, les représentants de la profession seront reçus par le ministre de la Justice Éric Dupond-Moretti qui, dans un communiqué, a salué "le courage des agents pénitentiaires, troisième force de sécurité de notre pays". En tout, l’administration pénitentiaire compte 45 000 agents dont 1 101 agents du pôle de rattachement des extractions judiciaires (Prej). La zone Provence-Alpes-Côte d’Azur Corse compte 270 agents affectés à ces unités.
Place Vendôme, l’intersyndi-cale devrait évoquer une série de revendications. Parmi celles-ci, "la réduction drastique des extractions en favorisant l’utilisation de la visioconférence des magistrats ou leurs déplacements en établissements", "une refonte et harmonisation des niveaux d’escorte" ou encore "le déploiement accéléré des brouilleurs de téléphones portables et du contrôle des drones". "Nous ne pouvons plus accepter la surpopulation pénale ainsi que la ventilation des emplois qui délaissent mois après mois nos effectifs tant sur la coursive que dans nos équipages", indiquent encore les organisations syndicales, dans un communiqué.
"On alerte depuis des mois, des années, ça dure depuis trop longtemps, déplore Cathy Forzi. C’est de plus en plus dangereux et on nous confie sans cesse de nouvelles missions sans nous donner les moyens. Vous avez vu ce qui s’est passé ? Ils sont mieux armés que nous… »
La Provence - le 15 mai 2024
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À Fleury-Mérogis, l’attaque d’Incarville n’étonne malheureusement pas ces agents pénitentiaires
La mort brutale de deux surveillants durant le transport d’un détenu fait resurgir les lacunes du système carcéral en matière d’effectifs et de moyens matériels.
À Fleury-Mérogis, l’attaque d’Incarville n’étonne malheureusement pas ces agents pénitentiairesLa mort brutale de deux surveillants durant le transport d’un détenu fait resurgir les lacunes du système carcéral en matière d’effectifs et de moyens https://t.co/p9xDf7URbM
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Par Pierre Tremblay
PRISON - « C’était une exécution. » Encore sous le choc, des centaines d’agents pénitentiaires ont observé, mercredi 15 mai, une minute de silence devant les prisons en mémoire de leurs deux collègues tués la veille dans l’attaque violente d’un fourgon à Incarville (Eure), qui transportait un délinquant toujours en fuite et activement recherché par la police.
De Fleury-Mérogis (Essonne) à Bordeaux-Gradignan, de Lyon à Nantes en passant par Marseille ou Nice, les agents pénitentiaires ont affiché leur « ras-le-bol ». Toute la journée, les syndicats pénitentiaires ont organisé une journée « Prison morte », à savoir la réduction au strict minimum de l’activité des surveillants, pour réclamer davantage de moyens humains et matériels.
Comme vous pouvez le voir dans notre reportage vidéo en tête d’article, Le HuffPost a suivi cette mobilisation devant la plus grande prison d’Europe, Fleury-Mérogis, où l’émotion et la colère cohabitaient. À notre micro, des agents pénitentiaires partagent leur émotion et expliquent pourquoi ce drame était, selon eux, prévisible.
Mission « flash » de l’Assemblée
Mardi, en fin de journée, le ministre de la Justice Éric Dupond-Moretti est venu rencontrer les familles et collègues des victimes, à l’issue d’une visite au pôle de rattachement des extractions judiciaires de Caen. « Naturellement ils sont effondrés », a-t-il dit.
C’est la première fois depuis 1992 qu’un agent de la pénitentiaire est tué dans l’exercice de ses fonctions, a rappelé le ministre de la Justice. « Tout sera mis en œuvre pour retrouver les auteurs de ce crime ignoble », a-t-il répété. L’attaque a été qualifiée sur le réseau X de « choc » par le président Emmanuel Macron. « Nous serons intraitables », a-t-il promis.
La commission des Lois de l’Assemblée nationale va mettre sur pied une mission « flash » chargée de faire des propositions d’ici à un mois « sur le transfèrement et les extractions de l’administration pénitentiaire » après l’attaque mortelle, a annoncé son président Sacha Houlié (Renaissance).
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"Ils sont morts, la prison est morte !" : colère à Aix-en-Provence après l'attaque d'un fourgon pénitentiaire
De nombreux centres pénitentiaires sont bloqués ce mercredi matin, dont celui de Luynes, à Aix-en-Provence. Un blocage en soutien aux deux agents pénitentiaires tués et aux trois blessés graves dans l'attaque d'un fourgon dans l’Eure.
"Ils sont morts, la prison est morte !" : colère à Aix-en-Provence après l'attaque d'un fourgon
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De nombreux centres pénitentiaires sont bloqués ce mercredi matin, dont celui de Luynes https://t.co/F4Kwhbh6m7
"Tous unis face au drame". C'est ce que l'on peut lire sur les pancartes brandies par les agents de la prison de Luynes, ce mercredi 15 mai. Après l'attaque d'un fourgon mardi dans l'Eure, dans laquelle deux agents sont morts et trois autres grièvement blessés, l'Intersyndicale a appelé à un blocage total des centres pénitentiaires. C'est le cas aujourd'hui dans de nombreuses prisons de la région Paca, comme ici, près d'Aix-en-Provence. Ici, 2 010 détenus sont incarcérés, pour une capacité de 1 400 places.
Environ 200 agents réunis
Environ 150 agents se sont réunis dès 3h30 du matin, rapportent nos reporters France 3 Provence-Alpes Baptiste Garguy-Chartier et Nicolas Chaix-Bryan. Ils étaient autour de 200 à 10h. "Ils sont morts, la prison est morte !", lance un agent pénitentiaire.
L’administration pénitentiaire est la troisième roue du carrosse du ministère de la Justice
Imane Pau, déléguée FO, secrétaire de la maison d’arrêt de Luynesnormal
France 3 Provence-Alpes
"C’était important pour nous parce que la pénitentiaire est en deuil !, déclare Imane Pau, déléguée FO et secrétaire à la maison d'arrêt de Luynes. Et les agents sont en deuil ! Il faut comprendre que l’administration pénitentiaire est la troisième roue du carrosse du ministère de la Justice et il faut mettre fin à cette hypocrisie. Nous sommes la troisième force de la nation, mais nous ne sommes pas considérés comme tel !"
"On ne peut accepter ce qu’il s’est passé hier. Il y aura un avant et un après. Et il est temps que notre administration et que notre ministre nous entende", réagit Amandine cordier (Ufap), cheffe de bâtiment.
Les agents demandent plus de moyens matériels
Concrètement, le blocage se traduit aujourd'hui par l'annulation des parloirs, visites, avocats. Seul un appel des détenus réguliers sera réalisé dans la prison et un panier repas sera distribué.
Dans la ligne de mire de leurs revendications : limiter les extractions judiciaires et privilégier les visioconférences. Ils demandent également plus de moyens matériels, des véhicules adaptés, des formations "à la hauteur des dangers qu'encourent les forces pénitentiaires". Autre revendication : mettre des brouilleurs sur les téléphones et les drones, certains détenus se font en effet livrer des colis secrètement par drone.
Une minute de silence est prévue à 11h ce mercredi matin. Le garde des Sceaux Eric Dupond-Moretti recevra l’Intersyndicale de l’administration pénitentiaire place Vendôme à 14h. Si les revendications ne sont pas entendues, et qu'il n'y a pas d'annonces concrètes après la réunion, "le blocage persistera", annonce l’Intersyndicale.
France3regions - le 15 mai 2024
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Fait divers
"C'est toute la famille administrative pénitentiaire qui est touchée" : le centre de détention de Châteaudun mobilisé au lendemain de l'attaque du fourgon
Au lendemain de l'attaque d'un fourgon pénitentiaire dans l'Eure, qui a coûté la vie au capitaine Fabrice Moello et au surveillant brigadier Arnaud Garcia, le personnel pénitentiaire est mobilisé, ce mercredi 15 mai, depuis six heures, devant le centre de détention de Châteaudun. Une minute de silence a été observée, à 11 heures, en présence du préfet d'Eure-et-Loir, Hervé Jonathan, et du sous-préfet de Châteaudun.
"C'est toute la famille administrative pénitentiaire qui est touchée" : le centre de détention de Châteaudun mobilisé au lendemain de l'attaque du fourgon https://t.co/3eFaUxW2Dk
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L'intersyndicale a appelé à une journée "Prisons mortes", ce mercredi 15 mai, suite à l'attaque du fourgon qui a entraîné la mort du capitaine Fabrice Moello et du surveillant brigadier Arnaud Garcia, et l'évasion du détenu Mohamed Amra, dit "La Mouche", toujours activement recherché. Trois agents ont été grièvement blessés.
Comme partout en France, les agents pénitentiaires du centre de détention de Châteaudun se sont réunis devant l'établissement, dès 6 heures, pour rendre hommage à leurs collèges décédés. Ils ont embrasé des palettes et accroché une banderole avec l'inscription "Pénitentiaire en deuil. Tombés pour la France".
"C'est toute la famille pénitentiaire qui est touchée et en deuil"
"L'intersyndicale a appelé à se réunir. Mais aujourd'hui, comme vous le voyez, il n'y a pas de banderole de l'intersyndicale déployée à Châteaudun (lire encadré). C'est toute la famille pénitentiaire qui est touchée et en deuil", a confié, ce matin, une gradée du centre de détention.
Le chef d'établissement Maxime Michel, présent aux côtés du personnel mobilisé, a été avisé de cette "décision collective" qui a neutralisé les mouvements vers l'intérieur ou l'extérieur du centre de détention. "Ce n'est pas un caprice du personnel. On ne se bat pas juste pour obtenir une paire de Rangers. On réclame davantage de moyens pour les extractions des détenus", souligne cette même gradée, qui connaissait, "de vue", un des deux agents tués. "Ils n'avaient aucune chance."
"On a tous en tête le drame de 1992"
"On a conscience des risques de notre métier, renchérit un surveillant pénitentiaire. On a tous en tête le drame de 1992". Stéphane Delabrière, détenu à la maison d’arrêt Bonne-Nouvelle de Rouen (Seine-Maritime), avait mortellement agressé le surveillant Francis Cabron. Un drame qui avait, comme aujourd'hui, engendré un mouvement de protestation dans de nombreux établissements pénitentiaires.
Le centre pénitentiaire d'Orléans-Saran bloqué au lendemain de l'attaque d'un fourgon dans l'Eure
Sur instruction du garde des Sceaux Éric Dupond-Moretti, une minute de silence a été respectée à 11 heures. Hervé Jonathan, préfet d'Eure-et-Loir, et Kevin Poveda, sous-préfet de Châteaudun, se sont rendus sur place auprès de l'administration pénitentiaire, du chef d'escadron Fabrice Jeanjacquot, commandant de la compagnie départementale de gendarmerie de Châteaudun et des sapeurs-pompiers du centre de secours principal dunois. Une gerbe a été déposée au pied du drapeau tricolore en berne.
"L'administration pénitentiaire est endeuillée. Deux agents du pôle de rattachement des extractions judiciaires de Caen (Calvados) ont perdu la vie, victimes de leur devoir : Fabrice Moello, capitaine pénitentiaire, entré dans l'administration pénitentiaire en 1995, et Arnaud Garcia, surveillant brigadier, entré en 2009. Nous ne les oublierons pas."
Trois autres de leurs collègues ont été grièvement blessés dans l'attaque du fourgon pénitentiaire. "Nos pensées sont également tournées vers eux."
Cet événement "particulièrement tragique" rappelle que les missions de l'administration pénitentiaire conduisent "parfois au sacrifice suprême, au service de la Nation, pour assurer la sécurité de nos concitoyens", a insisté le chef d'établissement.
"Vous n'êtes pas seuls"
Le préfet d'Eure-et-Loir a souhaité témoigner toute sa "compassion" et toute sa "solidarité avec la famille pénitentiaire" et partager "tout le chagrin et la peine des familles". "Vous n'êtes pas seuls. C'est tout le service public qui est en deuil. Ma présence aujourd'hui et celle du sous-préfet de Châteaudun sont l'expression de notre compassion et de notre solidarité. »
⚫️ #hommage | Hervé JONATHAN, Préfet d’Eure-et-Loir, s’est rendu ce matin au Centre de Détention de Châteaudun pour participer en présence de Maxime MICHEL, directeur du centre de détention, Kevin POVEDA, sous-prefet de l’arrondissement de Châteaudun, et des représentants de la… pic.twitter.com/igJraA9z5O
— Préfet d'Eure-et-Loir 🇨🇵🇪🇺 (@Prefet28) May 15, 2024
"Nous sommes avec vous dans le combat que nous menons ensemble pour assurer la sécurité de nos concitoyens et le respect des lois, a poursuivi Hervé Jonathan. Notre mission est essentielle, difficile, parfois dramatique. L'État et le gouvernement sont déterminés à poursuivre, à châtier et à présenter à la justice les auteurs de ces assassinats."
Mouvement reconduit jeudi. Présent dès 6 heures, ce mercredi matin, devant les portes du centre de détention de Châteaudun, avant de se rendre au centre pénitentiaire d’Orléans-Saran, Manuel Caillet-Breillet, délégué régional SPS (syndicat pénitentiaire des surveillants) est « sous le choc ». « On a appris dans les médias que deux des nôtres sont tombés en service par un commando venu les abattre froidement et trois autres ont été blessés grièvement. L’intervention a été rapide et nette. Ça donne froid dans le dos. » Le délégué régional affirme : « Nous savions qu’un jour, ça allait arriver car les moyens humains et matériels ne sont pas à la hauteur de la dangerosité de certains détenus. » Il ajoute : « Quand on transporte de l’argent, on utilise des véhicules blindés. Pareil quand il s’agit d’arroser des manifestants dans les rues de Paris. Mais pour transporter des détenus dangereux, on a des véhicules qui ressemblent à ce que l’on peut acheter en tant qu’artisan. Un petit aménagement est fait et on se dit “on verra si les gars sont encore là ce soir...” » Le syndicat pénitentaire des surveillants avait pris la décision de « bloquer » le centre de détention de Châteaudun, mercredi matin, « bien avant l’appel de l’intersyndicale ». « C’était inconcevable de ne pas se mettre devant les portes en soutien des collègues », souligne Manuel Caillet-Breillet. Le blocage est reconduit jeudi 16 mai, toute la journée, « dans les mêmes conditions », en accord avec la direction du centre de détention, afin de « maintenir la pression ». « Ce n’est pas qu’une pression, mais un mouvement en hommage à nos deux collègues décédés et blessés. J’ai une grosse pensée pour les familles qui n’ont plus leur futur père ou leur pilier de famille. »
L’Echo Républicain - le 15 mai 2024
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Le blocage de la prison de Saint-Quentin-Fallavier se poursuit
Ce jeudi 16 mai, ils sont 90 agents du centre pénitentiaire et du PREJ rassemblés devant les portes de la prison de Saint-Quentin-Fallavier.
"La pression doit se poursuivre afin d'être entendu par notre ministère et en mémoire de nos deux collègues assassinés. Comme hier, aucune extraction ne sera réalisée", prévient le personnel en colère.
Le Dauphiné libéré - le 16 mai 2024
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«Nos collègues ont été abattus comme des chiens», l’opération prison morte reconduite près de Rennes
«Nos collègues ont été abattus comme des chiens», l’opération prison morte reconduite près de Rennes https://t.co/XthHMWAH0H
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Le personnel du centre pénitentiaire de Vezin-le-Coquet, près de Rennes, a observé une journée prison morte ce mercredi 15 mai 2024 après le meurtre de deux de leurs collègues dans l’Eure. L’émotion se lisait sur tous les visages. Une opération qui sera reconduite demain jeudi 16 mai.
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"Journée noire" aussi aux Baumettes
Les agents des Baumettes ont bloqué les portes de la prison, hier matin dès l’aube, en soutien aux agents décédés et aux trois autres blessés lors de l’attaque sanglante du fourgon dans l’Eure, mardi matin.
"Journée noire" aussi aux Baumettes
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Les agents des Baumettes ont bloqué les portes de la prison, hier matin dès l’aube, en soutien aux agents décédés et aux trois autres blessés @laprovence pic.twitter.com/jv6ILl7lrD
• Claire GRAZIN
Une odeur de fumée a envahi les Baumettes hier matin. Plus d’une centaine d’agents pénitentiaires ont bloqué l’établissement à Marseille à l’appel de l’intersyndicale nationale dès 5 h. Plusieurs palettes ont été brûlées devant l’entrée de la prison. Même constat dans les établissements pénitentiaires d’Arles, de Tarascon, Luynes et du Pontet.
"C’est une journée noire, on ne peut rester indifférent", indique Jean-Charles Allen, secrétaire local UFAP-UNSA Justice aux Baumettes. Les agents ont témoigné leur solidarité envers leurs collègues. Ils ont observé une minute de silence à 11 h. Aïcha Khelfa, secrétaire locale et régionale adjointe CGT pénitentiaire Paca Corse, travaille depuis 25 ans dans le milieu. Elle s’est dit "choquée" des images de l’attaque. "On a alerté depuis janvier sur l’abaissement du niveau d’escorte, on savait qu’un jour ça allait arriver même si on espérait que ça n’arriverait jamais, malheureusement il faut attendre un drame pour qu’on nous écoute", assure la représentante syndicale CGT. Tous les agents interrogés déplorent le manque de reconnaissance de leur métier.
Plus de moyens humains et financiers
Elle dénonce "une mise en danger des collègues" quotidienne traduite par "un manque de moyens humains et financiers". Paul Courtaro, secrétaire régional CGT pénitentiaire, demande "des fourgons adaptés et blindés" pour assurer une meilleure protection du personnel. Selon lui, l’usage de la technologie est aussi possible afin d’éviter au maximum les convois judiciaires."On peut faire beaucoup de choses en visioconférence pour certains détenus", déclare-t-il.
Depuis 2019, les extractions judiciaires ne sont plus du ressort des forces de l’ordre mais de l’administration pénitentiaire.
"La formation n’est pas suffisante", souffle Jean-Charles Allen. Il souhaite une meilleure prise en charge des effectifs chargés de transporter les détenus, les agents PREJ. Ils sont 1 101 sur le territoire national à avoir effectué plus de 130 000 missions en 2023, selon les chiffres du ministère de la Justice. "Il faut qu’on ait une formation continue, un suivi et des pratiques régulières", défend le représentant syndical. Il arrive que les forces de l’ordre dédiées à consolider les effectifs de la prison ne soient pas présentes. "Quand il n’y a pas de policiers, on pratique l’auto-renfort par des agents", détaille l’homme qui travaille depuis trente ans aux Baumettes.
Malheureusement il faut attendre un drame pour qu’on nous écoute.„
AÏCHA KHELFA, SECRÉTAIRE LOCALE ET RÉGIONALE ADJOINTE CGT PÉNITENTIAIRE PACA CORSE
"Le risque zéro n’existe pas" Les agents pénitentiaires savent à quel point leur métier peut être dangereux. "Le risque zéro n’existe pas et, à l’extérieur, le cadre de l’établissement pénitentiaire n’existe plus, les menaces sont décuplées", admet Jean-Charles Allen. La dangerosité des individus auxquels ils font face expose les agents à d’autant plus de risques. "On fait face à une augmentation du banditisme, les individus sont lourdement armés", assure Aïcha Khelfa.
L’'intersyndicale appelle à maintenir les blocages
Les représentants des syndicats de l’administration pénitentiaire se sont félicités hier de l’ouverture d’un dialogue avec le ministre de la Justice sur certaines de leurs revendications en vue d’améliorer la sécurité lors des transferts de détenus, mais ont appelé à maintenir les blocages de prisons aujourd’hui, dans l’attente d’un accord écrit. "Un certain nombre d’engagements vont être pris rapidement" par le ministère, "on attend un relevé de décisions qui va nous être envoyé le plus rapidement possible, visiblement dès demain matin", a déclaré devant la presse Emmanuel Baudin, de FO, à l’issue d’une réunion entre le ministre Éric Dupond-Moretti et l’intersyndicale FO-UFAP-UNSA Justice-CGT-Syndicat pénitentiaire des surveillants. "En attendant, on va maintenir la pression et les mouvements sur les établissements pénitentiaires", a-t-il ajouté
La Provence - le 16 mai 2024
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ARLES
"La priorité ce n’est pas les détenus, mais la vie des personnels"
Environ 80 surveillants pénitentiaires ont manifesté hier matin devant la maison centrale d’Arles en hommage aux agents tués mardi dans l’Eure lors d’un transfert de détenu. Ils exigent des équipements et des formations supplémentaires.
ARLES
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"La priorité ce n’est pas les détenus, mais la vie des personnels"
Le personnel pénitentiaire de la maison centrale s’est réuni hier matin pour solliciter plus de moyens et de sécurité. @laprovence pic.twitter.com/tKWtwEIqEG
• Sarah UGOLINI
Aujourd’hui on exprime notre colère, on pense aux victimes et aux familles." Palettes brûlées, personnel allongé au sol en signe de soutien et forte mobilisation hier matin à la Maison centrale d’Arles. Près de 80 membres du personnel bloquent l’établissement pénitentiaire en soutien aux deux agents pénitentiaires qui ont perdu la vie et aux trois autres blessés hier sur un péage dans l’Eure lors du transfert d’un détenu. Surveillants pénitentiaires, mais aussi majors et officiers se sont réunis pour solliciter plus de moyens et de sécurité pour le personnel. Une minute de silence a également été observée à 11 heures, heure de la mort des deux agents pénitentiaires, et Marc Ollier, directeur des services pénitentiaires et chef d’établissement de la maison centrale d’Arles, a lu un discours de l’administration pénitentiaire. Le personnel répondait ainsi à l’appel national des organisations syndicales qui ont appelé à un blocage des établissements pénitentiaires. Une journée "Prisons mortes" selon l’intersyndicale.
La réduction des extractions exigée
À Arles, on exige la réduction des extractions pénitentiaires. "Il n’est pas nécessaire d’exposer les personnels à l’extérieur où on est le plus vulnérable. On peut faire des visios, réduire les extractions", fulmine Thomas, secrétaire local et régional de l’Ufap. L’émotion est vive au sein du personnel pénitentiaire. "On a des véhicules qui tombent en ruine, pas assez puissants, non blindés et sérigraphiés en plus, ce qui fait de nous des cibles sur la route", s’insurge le responsable syndical. Selon lui, "on fait des économies sur la vie des personnels". Un sentiment partagé par Camille, représentante de la CGT, qui estime qu’il faudrait "prioriser la visio pour éviter ce genre de sortie et d’incident". "On a des formations trop courtes pour les surveillants", ajoute l’un d’entre eux.
Pour Thomas, "aucune formation ne nous apprend à sortir d’un guet-apens lors d’une extraction judiciaire, on n’a pas les modus operandi". Eddino, de FO Justice, estime également que le manque de formation est aussi lié aux profils des détenus qui peuvent être des "personnes radicalisées ou présentant des troubles psychiatriques". Les représentants des syndicats FO, Ufap et CGT dénoncent tous un manque cruel de personnel, de formation et d’équipements. Les représentants de la profession devaient être reçus hier par le ministre de la Justice qui a salué "le courage des agents pénitentiaires, troisième force de sécurité du pays". L’issue de ces discussions devrait influencer la suite à donner au mouvement.
"On voulait montrer notre solidarité. Il n’est pas exclu de continuer le mouvement. La priorité ce n’est pas les conditions d’incarcération des détenus, mais la vie des personnels", conclut Thomas, représentant de l’Ufap.
La Provence - le 16 mai 2024
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Les transports à risques de détenus interrogent
Les syndicats de surveillants pénitentiaires maintiennent l’opération « prison morte » ce jeudi, après l’attaque dans laquelle deux agents ont été tués mardi, dans l’Eure. Des engagements du ministère de la Justice sont attendus.
Les transports à risques de détenus interrogent
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L’intersyndicale avait rendez-vous avec le ministre de la Justice, Éric Dupond-Moretti, notamment pour essayer de mieux sécuriser ces extractions de détenus. @OuestFrance pic.twitter.com/g3q4ZkDxvW
• Pierrick BAUDAIS.
Il y a de l’émotion, de la tristesse, mais aussi de la colère. Ce mercredi, les prisons de France sont bloquées », insiste Wilfried Fonck, l’un des secrétaires nationaux du syndicat Ufap-Unsa Justice.
À Fleury-Mérogis (Essonne), Nantes, Caen, Rouen (Seine-Maritime), Rennes, Mulhouse (Haut-Rhin), Lyon (Rhône)… des centaines de surveillants pénitentiaires avaient pris part à la journée prison morte après l’attaque du fourgon qui a coûté la vie à deux agents pénitentiaires, mardi, au péage d’Incarville (Eure). Trois autres agents ont été blessés, le pronostic vital de l’un d’eux étant toujours engagé.
Hier après-midi, l’intersyndicale avait rendez-vous avec le ministre de la Justice, Éric Dupond-Moretti, notamment pour essayer de mieux sécuriser ces extractions de détenus. Depuis 2019, leur transport au tribunal, à l’hôpital ou pour une reconstitution est assuré par des agents de l’administration pénitentiaire. Au total, en 2023, 1 101 agents dédiés à cette mission au sein de pôles spécialisés (Prej) ont ainsi effectué plus de 130 000 transferts, selon le ministère de la Justice.
En fonction de la dangerosité des détenus, le transport est classé du niveau 1 (le moins à risque) au niveau 4 (risque maximum). Mardi, le déplacement de Mohamed Amra, un détenu soupçonné d’avoir commandité des meurtres en lien avec des trafics de stupéfiants, avait été classé au niveau 3. Deux véhicules et cinq agents accompagnaient alors ce détenu. Était-ce suffisant ? L’équipement des agents était-il adapté ? On trouve systématiquement (des véhicules blindés) pour le transport de fonds, mais pas pour le transport des agents. Cherchez l’erreur… » s’est indigné un délégué du syndicat SPS à la prison de Strasbourg. Face aux tireurs, les agents n’avaient qu’ un simple SIG Sauer (une arme de poing) contre des armes de guerre », se désole Frédéric Liakhoff, secrétaire FO-Justice, au centre pénitentiaire de Caen.
Faut-il davantage de visioconférences ?
Wilfried Fonck de l’Ufap-Unsa doute toutefois que des véhicules blindés stoppent les malfaiteurs les plus déterminés . Ces derniers font désormais preuve d’une violence extrême , y compris les délinquants de moyenne envergure »,a constaté la commission d’enquête sénatoriale sur les trafics de stupéfiants en France.
Alors que faire ? Les syndicats réclament que davantage d’auditions de détenus devant les juges se fassent par visioconférence. Ou que les magistrats se déplacent davantage dans les établissements pénitentiaires. La solution, ce n’est pas plus de visio et moins d’extractions. C’est plus d’escortes, mieux équipées , estime au contraire l’avocat Me Henri de Beauregard. Les syndicats demandent aussi la fin des escortes panachées . Faute de personnels suffisants dans les Prej, certains déplacements de prisonniers ont lieu (en partie) avec des agents qui ne portent pas d’armes, car ils n’ont pas été formés ni habilités.
À l’Assemblée nationale, une mission flash devrait être bientôt constituée pour dresser un état des lieux de ces transfèrements de détenus et effectuer des propositions. Mais pour les syndicats, le problème est plus global et concerne la surpopulation carcérale, le manque chronique de surveillants. En Île-de-France, 800 postes sont vacants. Il faut un vrai débat , insiste Wilfried Fonck.
Hier, l’intersyndicale a appelé à maintenir le blocage des prisons dans l’attente « d’engagements écrits » du ministère.
OUEST-France - le 16 mai 2024
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Blocages
La colère ne retombe pas devant les prisons de France
Comme partout en France, au lendemain de la mort de deux des leurs dans l’attaque d’un fourgon, les surveillants pénitentiaires ont bloqué la maison d’arrêt de Seysses, au sud de Toulouse (Haute-Garonne), ce mercredi. Entre tristesse, colère et fatalisme, ils demandent davantage de moyens.
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La colère ne retombe pas devant les prisons de France
Entre tristesse, colère et fatalisme, ils demandent davantage de moyens. @le_Parisien pic.twitter.com/LX67YXrvfM
Paul Périé
DEUX jours après l’attaque mortelle du péage d’Incarville, l’émotion et le ressentiment sont toujours forts parmi les agents de l’administration pénitentiaire. Malgré un rendez-vous express ce mercredi avec le garde des Sceaux, Éric Dupond-Moretti, qualifié de « positif », l’intersyndicale FO-Ufap-Unsa Justice-CGT-Syndicat pénitentiaire des surveillants a maintenu son mot d’ordre de blocage des prisons pour ce jeudi matin.
« Un certain nombre d’engagements vont être pris rapidement » par le ministère, notamment pour améliorer l’armement des agents lors des transferts, et pour limiter ces transferts en développant les auditions judiciaires en visioconférence, a déclaré Emmanuel Baudin, secrétaire général de FO-Justice. « On attend un relevé de décisions qui va nous être envoyé le plus rapidement possible, visiblement dès demain, ce jeudi matin », a précisé M. Baudin. En attendant ce document écrit, « on va maintenir la pression et les mouvements sur les établissements pénitentiaires », a ajouté le syndicaliste. Sur le terrain, la colère était vive hier. Alors que la flamme olympique est attendue vendredi en Haute-Garonne, les surveillants pénitentiaires de la maison d’arrêt de Seysses, à Toulouse, avaient pris un peu d’avance hier. Vers 7 heures, des palettes ont été brûlées devant la prison, une heure après le début de l’opération de blocage dans toute la France.
« C’est la sidération »
Les personnels sont mobilisés « d’abord en soutien et avec une pensée pour nos collègues lâchement exécutés », explique Jérôme Combelles, représentant FO à Seysses (Haute-Garonne). « On dénonçait les manques depuis longtemps, il faut des améliorations. C’est un mouvement qui va durer. Mais c’est toujours au pied du mur que des choses sont engagées », poursuit Jérôme Combelles, déplorant qu’il ait fallu attendre deux morts, comme en 1992, pour qu’ils soient écoutés (cette année-là, un surveillant, Francis Caron, a été mortellement agressé à la maison d’arrêt de Rouen. Le 11 septembre de cette même année, un surveillant était tué lors d’une évasion de la maison centrale de Clairvaux).
En 1992, justement, Gérald Ferlicot, pour qui la journée d’hier a été « très dure », était dans la profession depuis un an et travaillait à Fleury-Mérogis. Avec plus de trente-deux ans d’ancienneté aujourd’hui et huit établissements à son actif, il a vu la situation évoluer, pas dans le bon sens selon lui. « Parfois, on compte un surveillant pour 120 à 140 détenus. Avant, on avait des bandits respectables. Aujourd’hui, ce sont juste des voyous, qui rackettent tout le monde. »
Malaise profond
Alors qu’il travaille à « l’infra », la sécurité de l’établissement, il voit de plus en plus de drogue et d’alcool circuler, souvent introduits grâce à des drones. Même écho à Fresnes (Val-de-Marne), où les agents chargés des extractions judiciaires ont refusé tout transport hier. « Je suis fils unique. Je n’ai pas appelé ma mère depuis hier et j’espère qu’elle ne regarde pas trop les images », lâche un fonctionnaire sous le choc. Autour de lui, ses collègues accusent tous le coup, d’autant plus qu’ils ont transporté Mohamed Amra, l’homme sorti du fourgon par ses complices. « Ça doit remonter à un an. On l’a extrait de la prison de la Santé (Paris XIV e) , déjà pour un rendez-vous avec un juge à Rouen, raconte le même surveillant. On a fait l’aller-retour, soit près de cinq heures de trajet, pour cinq minutes dans un bureau. »
« Il a simplement dit qu’il ne parlerait pas. Point. On est repartis au bout de cinq minutes, continue un autre agent, ajoutant : Alors cette attaque… C’est la sidération. Ça aurait pu être nous. » Aucun de ces professionnels ne se souvient d’éléments particuliers sur ce détenu.
À Toulouse, Frédéric Le Stanc, secrétaire de l’Ufap Unsa-Justice, parle lui aussi d’un manque clair de considération. « Il faudrait davantage de personnel », souligne-t-il, alors que la prison emploie environ 400 personnes, dont 300 surveillants pour près de 1 300 détenus « alors qu’on a officiellement 692 places ». Mais au-delà de cette surpopulation, c’est la sécurisation des transferts qui pose question après le drame de mardi.
« On demande à avoir un parc de véhicules avec du blindage, à être équipé de boucliers balistiques, d’armes d’épaule, à être formés pour répondre à cette violence. » Le malaise est profond et il est convaincu que les blocages seraient intervenus tôt ou tard, même sans la mort de leurs collègues. « On est écœurés. Il y a beaucoup de tristesse, de chagrin et de colère. On se sent délaissés. »
Alors que des pneus sont apportés pour nourrir le feu et qu’une certaine tension monte lorsqu’un proche d’un détenu essaie de faire entrer un sac de linge, les mines se font plus graves. David, surveillant depuis 2004 à Seysses et représentant du SPS, a quelques pistes : « 80 à 90 % du temps, ces sorties sont inutiles et coûteuses et augmentent le danger pour les surveillants. On pourrait mettre en place des visios ou faire venir du personnel médical sur place… » L’évasion d’hier a donc fait remonter à la surface un malaise latent et le gouvernement est attendu par une profession à bout de souffle.
Aujourd’hui en France, le 16 mai 2024
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ÉVASION DANS L’EURE Après le choc, la tristesse et la colère des agents pénitentiaires
Au lendemain de la mort de deux des leurs dans l’attaque d’un fourgon de transfert, les fonctionnaires ont organisé mercredi une opération «prison morte». A Villepinte comme à Marseille, ils alertent sur leurs conditions de travail et la dangerosité de leur métier.
ÉVASION DANS L’EURE Après le choc, la tristesse et la colère des agents pénitentiaires
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Les fonctionnaires ont organisé mercredi une opération «prison morte». @libe pic.twitter.com/aI1ZF4qpj7
• Par Juliette Delage
Tous les regards se sont braqués sur eux. Un petit groupe d’hommes et de femmes, soudés, les mines graves dans leurs vestes marine brodées «Prej 93». «Ça aurait pu être l’un d’entre eux», souffle, sans les quitter des yeux, un surveillant du centre pénitentiaire de Villepinte. Ils ont eu besoin de se retrouver d’abord, ont décidé d’arriver un peu après les autres, mercredi, devant les portes de la maison d’arrêt francilienne. Depuis l’aube, une soixantaine d’agents pénitentiaires de Villepinte, y compris leur directeur, se sont rassemblés là, répondant à l’appel de l’intersyndicale lancé la veille pour une opération «prison morte». «C’était important. Pour les familles des défunts, pour les collègues encore à l’hôpital… On est tous très choqués et dans la peine», glisse Cédric, surveillant de 45 ans.
Deux agents du Prej de Caen, le pôle de rattachement des extractions judiciaires, sont morts, mardi dans l’Eure, tués dans l’attaque violente du fourgon dans lequel ils transportaient un détenu, Mohamed Amra. Trois autres ont été grièvement blessés. Un tremblement de terre au sein de l’administration pénitentiaire qui n’avait pas connu de perte dans ses rangs depuis 1992. «On a tendance à oublier parfois qu’on fait un travail à risque», reconnaît Lily, qui a rejoint le corps il y a deux ans, au service des greffes, «pour mettre sa pierre à l’édifice, au service de la justice», comme ses parents avant elle. Et de reprendre : «On ne devrait pas.»
De Fleury-Mérogis à Bordeaux-Gradignan, de Lille aux Baumettes à Marseille, le mot d’ordre est simple, «service minimum». Une manière pour le personnel des prisons dese réunir pour «rendre hommage» et d’alerter, dans le même temps, sur «la dangerosité du métier». A Villepinte, entre 6 et 9 heures du matin, mis à part quelques titulaires de postes clés essentiels à la sécurité, «personne n’est entré, personne n’est sorti», souligne Philippe Khun, secrétaire national adjoint du Syndicat pénitentiaire des surveillants (SPS). Les activités organisées pour les prisonniers ont été annulées, ni les avocats ni les proches n’ont eu accès aux parloirs, aucune extraction n’a été organisée et seuls les repas et les promenades ont été assurés. A 11 heures, partout en France, tous les agents ont observé une minute de silence.
«Boule au ventre»
En parallèle de cette émotion collective émergent de multiples interrogations et revendications. Reçus mercredi par le ministre de la Justice, Eric Dupond-Moretti, les représentants des syndicats de l’administration pénitentiaire ont salué l’ouverture du dialogue sur certaines revendications en vue d’améliorer la sécurité lors des transferts des détenus, mais ont appelé à maintenir l’opération de blocage des prisons jeudi, dans l’attente d’un accord écrit. «Un certain nombre d’engagements» vont être pris rapidement par le ministère, et devraient être envoyés «le plus rapidement possible, visiblement dès demain matin», a déclaré Emmanuel Baudin, secrétaire général de FO-Justice.
Devant la prison de Villepinte, la question de l’armement est sur toutes les lèvres. «Les agents du Prej sont dotés d’arme de poing mais cela ne fait pas le poids face à des armes de guerre comme celles que l’on a vues dans l’attaque du fourgon, insiste Gwen, surveillante de 35 ans. Il nous arrive aussi de faire des transferts médicaux en urgence, la nuit, en tant que surveillants. Mais nous ne sommes pas armés et simplement équipés d’un petit gilet pare-balles. Pourtant, on est autant susceptibles d’être visés.»
Du côté des Prej 93, on serre les dents. «On est tous très investis. Quand on se lève le matin on ne sait pas à quelle heure on se couchera le soir, dit Stéphane, brigadier-chef. Là, le matin, on se dira qu’on embrasse peut-être nos enfants pour la dernière fois. On repartira avec la boule au ventre.» Dans leur viseur aussi, les effectifs, loin d’être à la hauteur. «Il arrive régulièrement que le niveau de sécurité des escortes soit diminué faute de personnel. On n’a pas d’autres choix que de s’exécuter», dit un de ses collègues. Le président de la commission des lois de l’Assemblée nationale, Sacha Houlié (Renaissance), a annoncé la création d’une mission chargée d’émettre, dans un délai d’un mois, des propositions «sur le transfèrement et les extractions de l’administration pénitentiaire».
Devant la prison des Baumettes à Marseille, où 200 agents étaient encore réunis mercredi après-midi, Mickaël, 25 ans, et sa collègue Christelle, 41 ans, ont sorti leurs chaises de camping. «On attend énormément de ces négociations, insiste Mickaël. Plus de moyens, plus d’équipements… Même les convoyeurs de fonds ont des fourgons blindés alors qu’ils ne transportent que de l’argent ! Nous, c’est comme si on se baladait avec un sac de billets sans protection, à chaque angle de rue, on sent le danger.» Tout le monde est «triste», «en colère». «Et dégoûté», ajoute Yannick, qui officie d’ordinaire à l’accueil de la prison. Depuis la veille, le quadra rembobine dans sa tête la vidéo de l’attaque découverte à la télé : «Ils n’ont eu aucune chance. S’ils les avaient juste braqués pour leur demander de libérer le détenu, ils l’auraient laissé partir. Même les détenus ici étaient choqués hier. D’ordinaire, quand il y a une évasion, ils hurlent tous. Là, on ne les entend pas. Ils sont solidaires avec leurs agents.»
«Ça aurait pu être moi»
Mohamed Amra est passé par les Baumettes il y a quelques mois, mis en examen pour «complicité de meurtre en bande organisée». Un détenu lambda, assurent les agents qui l’ont croisé. Les collègues de Sandro, 50 ans, ont fait son transfert jusqu’à Paris, en avion. Rien chez lui ne nécessitait une escorte au-delà du niveau trois, celle mise en place pour son transfert, concède-t-il. «Le problème, relève-t-il, c’est que comme la police manque de personnel, on nous demande parfois de renforcer les effectifs pénitentiaires pour compenser. Hier, les policiers n’étaient pas là. Ici aux Baumettes, c’est rare, mais c’est déjà arrivé… Nous n’avons pas le même équipement en matière d’armes, pas les mêmes habilitations. Il nous faudrait certes plus de moyens et de la formation, mais aussi que chaque institution tienne son rôle.» Lui aussi est encore sonné par la violence de l’attaque : «Ils avaient des moyens très très lourds et ils ont tiré les premiers. Je suis chauffeur, en première ligne. Ça aurait pu être moi… Cette situation-là, personne ne s’y attendait.» Reprendre le travail après ça ? «Compliqué. J’ai une famille, j’ai envie de rentrer chez moi le soir.»
Libé - le 16 mai 2024
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A Caen, hommage ému à deux «frères d’armes»
Dans la cour du centre pénitentiaire du Calvados, les collègues des deux agents tués, sous le choc, se sont recueillis mercredi lors d’une cérémonie marquée par le silence et le chagrin.
A Caen, hommage ému à deux «frères d’armes»
— framafad paca corse (@WaechterJp) May 17, 2024
Dans la cour du centre pénitentiaire du Calvados, les collègues des deux agents tués, sous le choc, se sont recueillis mercredi lors d’une cérémonie marquée par le silence et le chagrin. @libe pic.twitter.com/aVYhdqdYFI
• Anne-Laure PineauEnvoyée spéciale à Caen
Dans le quartier Beaulieu, à Caen (Calvados), le centre pénitentiaire est comme blotti au milieu des immeubles d’habitation. A 11 heures, mercredi, des voitures se garent à la va-vite dans les rues adjacentes. Quelques habitants passent une tête à travers la grille, pour venir témoigner leur soutien au personnel pénitentiaire endeuillé par la mort de deux de leurs collègues la veille, dans l’attaque à l’arme lourde du fourgon qui transportait le détenu Mohamed Amra. Trois autres ont été blessés, dont l’un avait toujours mercredi son pronostic vital engagé.
La cour de la prison est pleine, mais on pourrait entendre une mouche voler. La minute de silence, qui s’est tenue dans tous les établissements de France à l’appel de l’intersyndicale nationale pénitentiaire, en a ici duré dix. Les ombres d’Arnaud Garcia, 34 ans, et Fabrice Morello, 52 ans, flottent dans l’air. Des visages connus, des camarades de cantine : ces deux agents appartenaient au pôle de rattachement des extractions judiciaires (Prej), dont les locaux se situent dans la prison caennaise. Le premier, surveillant brigadier depuis 2009, était marié et attendait la naissance d’un enfant. Le second, capitaine depuis 1996, était pacsé et père de jumeaux de bientôt 21 ans. Ils sont les premiers agents de la pénitentiaire tués dans l’exercice de leurs fonctions depuis 1992.
«Deuxième famille». C’est Stéphane Bredin, le préfet du Calvados, qui brise le premier le silence, pour rendre hommage aux deux hommes, entouré du directeur du centre pénitentiaire, de représentants de la gendarmerie ou des pompiers. Un discours solennel et bref qui fait réagir Bruno Brasme, secrétaire local du syndicat pénitentiaire Ufap-Unsa. «Il y en a marre de voir les collègues tomber», lâche-t-il. Face aux journalistes, les bouches sont cousues par le chagrin, les larmes au bord des yeux. «Ça aurait pu être moi», évoque un des agents présents. Beaucoup de retraités se sont déplacés pour soutenir ceux de leur «deuxième famille». L’un d’eux, très ému : «J’ai vingt-cinq ans de boîte, je connaissais l’un des morts et les trois blessés, ce sont comme des frères d’armes.»
Abattement. Les quelques membres du Prej partent les premiers s’enfermer dans leurs locaux. «Ils ont perdu leur chef, une recrue et trois membres sont blessés… ils sont dévastés», explique Frédéric Liakhoff, secrétaire du syndicat FO-Justice au centre pénitentiaire de Caen, qui attend du garde des Sceaux, Eric Dupond-Moretti, une réaction : «Nous sommes dans l’écœurement car nous travaillons dans des conditions de plus en plus dégradées et nos vies sont en danger. J’espère que des mesures fortes seront prises pour assurer notre sécurité. Je m’inquiète du recrutement, également : cet événement ne risque-t-il pas de faire peur ?»
En début d’après-midi, les lieux retrouvent leur calme, les banderoles et palettes de bois ont été rangées. Le signe d’un abattement généralisé ? Un surveillant brigadier, qui souhaite rester anonyme, ne décolère pas d’une réaction qu’il juge trop timorée, après avoir pourtant «perdu deux collègues» : «Ce n’est pas normal que nous laissions passer aujourd’hui un transfert médical non vital [hors de la prison], que nous continuions les promenades… Nous devrions être tous en colère, nous qui travaillons avec pour seules armes nos pare-lames, nos clés et nos cerveaux, alors même que les frais de fonctionnement de nos prisons baissent année après année.» Il s’inquiète déjà : «Demain, tout sera revenu comme avant.»
Libé le 16 mai 2024