Adoptée en janvier 2016, la loi de modernisation de notre système de santé n’a toujours pas fait l’objet de décret d’application en ce qui concerne ses dispositions sur la réduction des risques en prison.
Réduction des risques en prison : la loi de modernisation de notre système de santé sortie en 2016 n’a toujours pas fait l’objet de décret d’application en ce qui concerne ses dispositions sur la réduction des risques en prison.https://t.co/dSHxEmhw67
— framafad paca corse (@WaechterJp) January 30, 2024
Les prisonniers ont eux aussi droit à la santé : c’est, en somme, le message que veulent faire passer dix-sept associations dans un communiqué publié hier, dont Act-Up, Aides, la Fédération Addiction, le Syndicat de la magistrature, l’Observatoire international des prisons, la Ligue des droits de l’homme ou encore Médecins du monde.
Ils reprochent à l’État de ne toujours pas avoir adopté de décrets d'application concernant la réduction des risques et le principe d’équivalence des soins entre le milieu ouvert et le milieu fermé, en application de la loi de modernisation de notre système de santé qui date de 2016.
Une prévalence du VIH et des hépatites 6 à 10 fois plus élevées en milieu carcéral
« En France, la prévalence des addictions parmi les personnes incarcérées est bien plus importante qu’en milieu ouvert », rappellent les associations. « On estime qu’un tiers des personnes qui entrent en prison présentent une problématique addictive hors tabac et que la quasi-totalité continue à consommer en établissement pénitentiaire dans des conditions qui présentent des risques importants pour leur santé ».
Ainsi, environ 40 % des personnes en milieu pénitentiaire ont déclaré avoir déjà partagé du matériel de consommation, ce qui explique entre autres les chiffres très élevés du VIH et des hépatites virales en milieu fermé : on estime que leur prévalence est 6 à 10 fois plus importante en prison qu’à l’extérieur.
Une situation qui aurait dû être, si ce n’est résolue, tout au moins atténuée, par la loi de modernisation de notre système de santé. Celle-ci prévoyait en effet la distribution gratuite de matériel, notamment des seringues stériles et antidotes en cause d’overdose. Or, huit longues années après, la loi n’est toujours pas appliquée.
Les droits fondamentaux des personnes incarcérées sont « bafoués »
« La réduction des risques en prison est encore extrêmement limitée. La distribution de matériel pour les usagers et usagères de drogue varie très fortement d’un établissement pénitentiaire à l’autre », précisent les auteurs du communiqué. Une situation qui « bafoue le respect des droits fondamentaux des personnes incarcérées, met en danger leur santé déjà particulièrement fragile et contribue à la propagation des épidémies de VIH et des hépatites » en milieu pénitentiaire, ajoutent-ils.
Dans ce contexte, les 17 associations ont décidé d’attaquer l’État devant la justice et d’interpeller les parlementaires. Elles demandent surtout à ces derniers d’utiliser leur droit de visite dans les établissements pénitentiaires pour observer les conditions d’incarcération, d’interroger le gouvernement par des questions écrites ou orales sur le sujet et de saisir la contrôleuse générale des lieux de privation de liberté.
Les associations souhaiteraient, également, que les députés ajoutent la question de la réduction des risques au plan de travail du groupe d’études prison de l’Assemblée nationale.
Raphaël Lichten