Vingt-cinq interpellations, allant des organisateurs aux petites mains, sans oublier les voyous opportunistes, ont été menées lundi après des investigations mobilisant 200 enquêteurs. La traque d’ampleur ne fait que commencer.
Attaques de prisons : premier coup de filet contre les caïds qui veulent déstabiliser l’État
— framafad paca corse (@WaechterJp) May 1, 2025
Vingt-cinq interpellations. La traque d’ampleur ne fait que commencer. @Le_Figaro pic.twitter.com/gNRgk1CFm7
• Christophe Cornevin Paule Gonzalès
Une carte se dessine. Celle de ces actions simultanées et violentes contre les prisons derrière lesquelles la République a été attaquée. Les 25 interpellations qui se sont déroulées lundi au petit matin, tout comme celles qui ne devraient pas manquer de suivre dans les prochains jours, lèvent un coin du voile sur les auteurs. Et sur la nature de ces menaces et violences contre des agents pénitentiaires, ciblés jusque dans leur résidence personnelle, de ces rafales de kalachnikov contre la porte de la prison de Toulon, de ces cocktails Molotov lancés contre les établissements pénitentiaires et de ces incendies de véhicules de surveillants sur les parkings. Ce que les 200 enquêteurs ont mis au jour, à travers l’équipe commune d’enquête entre la juridiction nationale de lutte contre la criminalité organisée (Junalco) et le Parquet national antiterroriste (Pnat), c’est que cette centaine de faits « est entièrement signée des acteurs du trafic de stupéfiants », note un proche du dossier.
Exit donc les soupçons d’actions de l’ultra gauche ou d’une quelconque ingérence étrangère. Ainsi demeure la piste d’une riposte contre la création prochaine de deux quartiers de haute sécurité totalement étanches pour incarcérer les 200 plus dangereux narcotrafiquants. Pour l’instant, les forces de sécurité n’ont pas interpellé les plus gros bonnets. Il n’est pas davantage démontré, à ce stade, qu’il existe une convergence des luttes entre les gangs les plus médiatiques.
Sur les 25 interpellations, cinq l’ont été en détention, au sein de plusieurs maisons d’arrêt. Une dans l’établissement de Saint-Quentin-Fallavier, deux dans celui d’Aix-Luynes et deux à la maison d’arrêt d’Avignon. Toutes sont liées au narcotrafic et il s’agirait majoritairement de prévenus, certains ayant été incarcérés récemment. L’un d’entre eux serait soupçonné d’être à l’origine de la boucle Telegram créée au nom d’un faux groupement de Défense des droits des prisonniers français (DDPF) appelant à faire trembler et à déstabiliser la troisième force de sécurité du pays. Une boucle qui, selon les enquêteurs, a fait tache d’huile sur d’autres réseaux sociaux, comme Snapchat et TikTok, et aurait suscité des vocations pour aller menacer et vandaliser le monde pénitentiaire.
Des électrons libres
Si « la boucle Telegram témoigne d’un début d’opération structurée, il va s’agir pour le Parquet antiterroriste de confirmer ou d’infirmer cette piste pour savoir s’il reste saisi ou s’il se dessaisit du dossier au profit de parquets locaux », souligne cette source. Parmi les 25 interpellés, on compterait certes des petites mains du trafic de stupéfiants et des proches de détenus, mais aussi des individus connus pour leurs fonctions d’organisateurs au sein de ces réseaux criminels, même s’ils n’en sont que des seconds couteaux. Par ailleurs, beaucoup appartiendraient à la petite voyoucratie de cités qui gravite autour du trafic de stupéfiants. Ces électrons libres en auraient profité « par effet mimétique » pour régler quelques comptes avec les surveillants de prison. Les interpellations ont notamment eu lieu en région Rhône-Alpes, en Provence-Alpes-Côte d’Azur, mais aussi beaucoup en Île-de-France et dans le Grand Est, a-t-on appris d’une source proche du dossier. Parce qu’il s’agit de procédures antiterroristes, les gardes à vue pourront durer jusqu’à jeudi soir prochain.
Ce premier coup de filet et cette première esquisse de scénario, quinze jours après les faits, ont mobilisé les meilleurs services d’enquête et des techniques seulement à la main du Parquet national antiterroriste. La téléphonie et la police scientifique jouent un rôle déterminant dans cette traque à marche forcée, qui va s’amplifier avec les perquisitions qui se sont déroulées lundi matin. « Nous avons récupéré sur le terrain des moyens utilitaires, des munitions, des résidus de substances, mais aussi des empreintes qui nous ont permis de remonter le fil des auteurs. Il y a eu un énorme travail d’exploitation de vidéosurveillance et de drones utilisés par les auteurs », souligne une source proche du dossier. C. C. ET P. G.
Le Figaro - le 29 avril 2025