Alors que, depuis dix jours, pas moins de 65 attaques ont visé des centres pénitentiaires et des gardiens, François Bayrou, Gérald Darmanin et Bruno Retailleau se sont rendus ce mercredi à Saint-Quentin-Fallavier.
Le gouvernement au chevet des prisons visées par pas moins de 65 attaques depuis 10 jours @le_Parisien pic.twitter.com/OQpYjBahN3
— framafad paca corse (@WaechterJp) April 25, 2025
Olivier Beaumont et Valérie Hacot
C’est ce qui s’appelle une arrivée en pack. François Bayrou et ses deux ministres d’État, Bruno Retailleau (Intérieur) et Gérald Darmanin (Justice), étaient en visite ce mercredi après-midi à la prison de Saint-Quentin-Fallavier (Isère). Une image suffisamment rare pour souligner l’importance de l’enjeu aux yeux de l’exécutif, alors que pas moins de 65 attaques et agressions diverses ont visé centres pénitentiaires et gardiens depuis dix jours.
Pour le gouvernement, pas de doute, cette flambée de violence inédite est le fait des narcotrafiquants, en réaction au tour de vis annoncé contre eux par les pouvoirs publics (proposition de loi contre le narcotrafic en passe d’être adoptée par l’Assemblée nationale, création de prisons exclusivement réservées aux plus gros trafiquants…). « Ces attaques montrent que l’action du gouvernement et de l’État touche juste », a assuré le Premier ministre lors de ce déplacement. Ce dernier a toutefois aussi bien en tête, qu’à terme, ces agressions à répétition pourraient ternir encore davantage l’image de son équipe gouvernementale, qui a érigé la sécurité des Français au rang de ses priorités.
« La guerre va être totale et implacable »
« L’opinion publique est interloquée que des dealers puissent tenter d’impressionner la République », consent Matignon, tout en assurant que contre les narcos, « la guerre va être totale et implacable ».
Histoire de bien faire passer le message, et tenter de rassurer l’opinion justement, ce déplacement groupé a été décidé ce week-end. Le garde des Sceaux, Gérald Darmanin, qui a la tutelle de l’administration pénitentiaire, a soufflé l’idée d’aller à Saint-Quentin-Fallavier. Bruno Retailleau, lui aussi en première ligne dans la lutte contre le narcotrafic, a également été associé : « On ne peut pas dire que le ministre de l’Intérieur se soit occupé de la question depuis une semaine. Il semble plus dans sa campagne LR qu’autre chose », grince, vachard, un député du camp présidentiel. Bruno Retailleau, qui était en meeting à Cannes ce mercredi en fin d’après-midi pour sa course à la présidence du parti de droite, s’est d’ailleurs discrètement éclipsé pendant la conférence de presse de François Bayrou… D’autres élus font aussi état de tensions récurrentes entre Retailleau et Darmanin. « Ils peuvent s’énerver l’un contre l’autre car ils sont tous les deux dans le même silo, potentiellement en compétition. Mais, ils pensent la même chose », balaie un proche de François Bayrou.
Macron devrait lui aussi se mêler de ce sujet
Trois ministres et pas des moindres donc, mais pas de mesures fracassantes à la clé, si ce n’est l’annonce par le locataire de Matignon de la possibilité d’une surveillance de leur domicile par les agents pénitentiaires qui le souhaitent. François Bayrou s’est ainsi employé à « montrer au personnel pénitentiaire qu’on est avec eux […] parce qu’ils sont en première ligne, parce qu’ils sont notre dernier recours », a-t-il insisté lors de sa conférence de presse. Mais l’objectif recherché n’est pas celui de la réponse concrète. « L’idée en faisant un gros déplacement symbolique comme celui-là, c’est de montrer qu’on ne se laissera pas faire contre les narcos », souligne ainsi un conseiller gouvernemental. « Dans une guerre, soit on mène bataille, soit on tient la position. Là, on tient la position », renchérit Matignon.
Les prisons et la lutte contre le narcotrafic vont continuer à occuper le devant de la scène pour l’exécutif durant les prochaines semaines. Et ce, jusqu’au plus haut sommet de l’État. Selon nos informations, Emmanuel Macron, pourtant plutôt mobilisé sur les questions internationales, devrait lui aussi se mêler de ce sujet ô combien sensible.
Le 14 mai, date anniversaire de l’attaque d’Incarville, qui avait permis au narcotrafiquant Mohamed Amra de se faire la belle et entraîné la mort de deux agents pénitentiaires. Emmanuel Macron devrait présider une cérémonie d’hommage aux victimes en présence des familles. Une visite du chef de l’État dans une prison est également envisagée dans la foulée. De quoi souligner à nouveau que cette bataille revêt un caractère crucial pour le gouvernement et… sa crédibilité.
Le Parisien - le 24 avril 2025